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Réflexions sur les managers d'après crise

Publié le jeudi 23 juillet 2020 , www.lagazettedescommunes.com

Ces dernières semaines, nombreux sont les cadres territoriaux qui ont été surpris par des réactions disproportionnées, voire inadaptées, de certains de leurs agents. Conséquences des conditions dans lesquelles la crise a été vécue par chaque agent, elles imposent un repositionnement des managers, explique Rémy Berthier.

visuel Réflexions sur les managers d'après crise

Ces dernières semaines, nombreux sont les cadres territoriaux qui ont été surpris par des réactions disproportionnées, voire inadaptées, de certains de leurs agents. Les similitudes relevées dans leurs récits permettent d’esquisser quelques hypothèses qui viennent éclairer un rôle essentiel du manager à la sortie d’une crise.

Ces réactions peuvent être interprétées comme des symptômes d’un mal-être, souvent inconscient, issu d’un contexte inédit auquel chacun a dû s’adapter par nécessité, refoulant ses émotions et ses peurs face aux incompréhensions, incertitudes et injonctions contradictoires. Cette crise sanitaire est venue percuter nos valeurs les plus profondes, que ce soit par la restriction drastique de libertés fondamentales comme celles de se déplacer ou de participer à un culte, mais aussi nos rites sociaux qui forgent le cohésion d’une société, des plus usuels comme ceux de salutation aux plus intimes comme les rituels de funérailles.

Cette crise profonde, les agents l’ont traversée dans des situations très diverses, souvent très difficiles, confinés dans des conditions matérielles inconfortables ou de forte promiscuité, fortement mobilisés en présentiel ou en télétravail intense, en contact avec des personnes malades ou à risques, déplorant parfois la perte de proches. Ils ont été marqués dans leur être et le retour dans « le monde d’après » s’avère bien plus délicat qu’ils ne l’imaginaient.

Face à ce constat, le manager a dû une nouvelle fois s’adapter.

Au plus fort de la crise, il avait endossé la figure du skipper d’un voilier pris dans la tempête, qui rassure et décide malgré le contexte incertain, puis assume et ajuste autant que de besoin. Il s’est ensuite investi dans les questions organisationnelles et sanitaires liées à la reprise des activités (1). Il doit maintenant, et beaucoup ne s’y attendait pas, se poser en « facilitateur-rassembleur » et entrer dans le champ de l’intelligence émotionnelle.

Il est alors amené, lors de réunions d’équipe, à favoriser la libération de la parole pour que chacun se dise et soit reconnu dans sa singularité, condition indispensable pour pouvoir entendre et reconnaître celle de l’autre et des autres.

Ainsi, plusieurs cadres m’ont exprimé leur étonnement, mais aussi leur satisfaction, d’avoir permis une sorte de catharsis collective, étape nécessaire pour aller de l’avant dans une démarche résiliente. Ils découvrent souvent leur légitimité dans ce rôle, en complémentarité avec les psychologues du travail et les médecins de prévention.

Ce rôle du manager n’est cependant pas né avec cette crise. L’importance de la verbalisation a déjà été mentionnée dans des collectivités touchées par des attentats, comme à Nice ou à Strasbourg, mais aussi de manière plus quotidienne par les personnels des SDIS ou des polices municipales au retour d’interventions difficiles.

En portant une attention active envers nos agents, dans toutes leurs dimensions et dans leur complexité, tout en restant dans une posture pleinement managériale, nous pouvons exercer en plénitude notre beau métier d’encadrants et de dirigeants territoriaux !

Note 01Cette gestion agile de la crise a été décrite dans le « Retour d’expérience sur la gestion de la crise sanitaire pour penser le monde d’après » de l’AATF.Retour au texte