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Télétravail : des clés pour protéger la santé des agents

Publié le vendredi 9 octobre 2020 , www.lagazettedescommunes.com

Quel bilan peut-on tirer de la mise en place du télétravail dans les collectivités ? Comment les employeurs se sont-ils adaptés pour garantir la santé des agents tout en maintenant la continuité du service public ? Aline Ridet, directrice générale ajointe RH de la Région Île-de-France et Perrine Bouchard, avocate chez Seban associés, livrent leurs analyses.

visuel Télétravail : des clés pour protéger la santé des agents

Contraintes par l’épidémie de coronavirus de se lancer dans la pratique du télétravail, parfois à marche forcée, les collectivités territoriales ont dû s’adapter au plus vite. Cinq mois après le déconfinement, le télétravail reste encore massivement pratiqué. Mais si sa pratique s’est accélérée où en est-on du cadre juridique à la lumière des évènements récents?

« Le décret de mars 2020 est venu préciser celui de 2016 en fixant les modalités de mise en œuvre du télétravail dans la fonction publique en y apportant quelques innovations comme la quotité de 3 jours ou les dérogations possibles à cette durée qui sont principalement pour des raisons de santé (handicap, grossesse…) ou une situation exceptionnelle perturbant l’organisation du travail sur le site comme l’a été le déclenchement du confinement  » détaille Perrine Bouchard, avocate chez Seban associés qui précise que le texte laisse également la possibilité pour l’agent d’utiliser son équipement personnel.

Autre avancée, il instaure la possibilité pérenne d’un accès au télétravail pour les agents dont les missions sont télétravaillables, quand il fallait auparavant une autorisation de l’employeur. Désormais, c’est l’agent qui en fait la demande écrite en ayant, de plus, la possibilité de contester le refus de l’employeur si ce dernier s’oppose à la mise en œuvre du processus.

Pour mettre fin au télétravail, l’employeur doit désormais motiver son retrait d’autorisation. Un délai de prévenance de deux mois est par ailleurs nécessaire pour faire cesser l’activité en télétravail.

Le confinement ne doit pas servir de base à la pratique

Précurseur en la matière, la Région Ile-de-France n’a pas attendu ces dernières avancées juridiques pour se lancer dans l’aventure. « Nous pratiquons le télétravail depuis 3 ans, nous avons un recul sur la question », résume Aline Ridet, DGA en charge des ressources humaines à la Région Ile-de-France. Au siège de la Région, 65 % des agents sont en télétravail dont 70 % sur des fonctions télétravaillables. Parmi eux, 73 % sont des femmes (contre 62 % d’hommes).

Malgré cette période de recours massif, Aline Ridet met en garde : « Le confinement n’est pas une période sur laquelle on peut se baser. Ce n’était pas un choix mais une période imposée à tous avec son lot de stress et d’angoisse. En temps normal, le télétravail ne doit pas être subi, il doit être choisi par l’agent. »

Si la réduction du temps de trajet et la diminution de stress sont souvent citées comme des avantages non négligeables, les risques du télétravail sur la santé émergent peu à peu. Difficulté de se déconnecter, risques de pathologies en raison d’une trop grande immobilité, isolement… Alors, comment préserver la santé des télétravailleurs? « Il est impératif de rester vigilant. Dans notre collectivité, parmi les agents en télétravail, 20 % considèrent que cette pratique à un effet négatif sur les échanges collectifs, 25 % ont ressenti un isolement et 15 % considèrent avoir eu des difficultés pour gérer leur vie professionnelle et leur vie privée. Ce n’est pas une majorité, certes, mais il faut rester attentifs », souligne Aline Ridet.

Une responsabilité inchangée pour l’employeur

« La responsabilité de l’employeur reste la même en terme de santé, rappelle de son côté Perrine Bouchard. Parmi les points de vigilance, la collectivité à l’obligation d’adapter le poste de travail pour les agents en situation de handicap. De même que sa responsabilité reste engagée en cas d’accident de service ». Ce qui induit notamment pour la collectivité, la prise en charge des frais médicaux.

« La difficulté, c’est qu’il va falloir matérialiser les faits pour les agents victimes de ces accidents qui se sont déroulés à domicile. Cela se fera surement via une attestation sur l’honneur », anticipe Perrine Bouchard.

L’employeur doit également s’assurer de la conformité des lieux de travail de l’agent. Une prérogative assez compliquée à mettre en place quand le lieu de travail est également le domicile de l’agent. « Une délégation du comité médical pourrait très bien le faire après accord du fonctionnaire. Juridiquement, les textes sont tout à fait transposables », prévoit encore l’avocate qui conseille par ailleurs aux employeurs publics de s’appuyer sur les ressources de la médecine préventive.

Se former et accompagner

D’un point de vue managérial, il est indispensable pour Aline Ridet de fixer un cadre clair aux encadrants comme aux agents et d’y travailler en amont.  » Il faut former les encadrants qui ont une lourde charge dans ce processus, à savoir, piloter à distance une équipe et être attentifs aux signaux faibles. Cela ne s’improvise pas. »

Avant de passer, comme la Région Ile-de-France, d’un encadrement classique à un management par objectif, il est d’abord nécessaire de responsabiliser et de faire confiance aux agents. « Nous avons voulu miser sur l’autonomisation. Cela signifie aussi que l’encadrant ne se formalise pas quand un agent doit aller chercher ses enfants à l’école et revient ensuite. De même, si l’agent dépasse son volume horaire de travail et se connecte à des heures tardives, l’encadrant doit intervenir », conclut Aline Ridet.

Pour voir ou revoir le webinaire : Télétravail : comment protéger la santé des agents