En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de cookies pour vous proposer des services et offres adaptés. En savoir plus.

Décentralisation et service public : l'avenir en débat... matinal

Publié le vendredi 12 octobre 2018 , www.lagazettedescommunes.com

9h00 du matin, Grand auditorium de la cité des Congrès de Nantes... et au lendemain de la soirée d'anniversaire du Syndicat national des DG ! A priori, ce ne sont pas les conditions idéales pour aborder " la question qui tue " : Faut-il garder une fonction publique ? C'est le politologue Olivier Rouquan, spécialiste de la gouvernance territoriale, qui relève le défi.

visuel Décentralisation et service public : l'avenir en débat... matinal
JMJ

Un petit rappel historique pour commencer : le modèle institutionnel et administratif français correspond à un postulat : il fallait construire un Etat « au-dessus » de la société civile, et donc, pour ses agents, un statut particulier correspondant à la notion de prérogative de fonction publique.

C’est précisément ce modèle qui est progressivement abandonné en Europe, constate Olivier Rouquan (1). Il rappelle, devant cet amphi rempli de DG toujours en quête d’une clarification de leurs missions et responsabilités, que certains Etats européens disposent d’agents publics qui relèvent principalement du droit commun du travail.

La puissance publique en question

Ce critère de la puissance publique, qui a irrigué la construction du modèle administratif français est attaqué. Depuis 15 ans, on constate une crise de légitimité de la représentation, qui en conséquence, interroge aussi les fonctionnaires. Alors certes, il est facile d’invoquer le manque de résultats visibles pour le citoyen. Mais plus profondément, la spécificité du secteur public est de plus en plus difficile à percevoir. Le dogme selon lequel la sphère publique doit réduire son intervention parce que le privé serait plus performant, s’impose.

Or, relève le politologue, l’Etat ne peut plus agir sans les pouvoirs locaux : le compromis est nécessaire. L’Etat doit donc négocier. Les collectivités territoriales, elles, savent le faire : elles négocient, entre elles et avec leurs partenaires privés, depuis toujours. Il est donc impératif et urgent de dépasser les blocages actuels, qui se cristallisent autour de cette grille de lecture entre «ancien et nouveau monde ».

Les fonctionnaires interrogés… et interrogatifs

Désormais, les interventions territoriales doivent justifier le sens qu’elles donnent à leur action. D’où la nécessité de justifier la pertinence du statut. Une justification à double titre : non seulement  vis-à-vis du public, mais aussi (et c’est assez nouveau) vis-à-vis des agents eux-mêmes.

Il faut expliciter les actions et savoir les mettre en ordre au-delà  des cadres juridiques et administratifs classiques. Les agents doivent aujourd’hui savoir pourquoi et pour qui ils travaillent. C’est donc bien une nouvelle culture administrative à développer.

Gestion de l’aléatoire

C’est un des aspects encore peu étudié de la question de la « contractualisation » de la fonction publique. Elle aboutira, car visiblement c’est un engagement présidentiel. Sauf à courir le risque du développement d’une fonction publique à deux vitesses, il faudra régler les épineuses questions du régime indemnitaire et de la sécurité professionnelle de ces agents.

En outre, il faudra cerner les nouveaux métiers, liés principalement à la numérisation, qui justifient ces emplois contractuels. Un défi, estime Olivier Rouquan, car ces métiers ne relèvent pas de la fidélité et de l’intérêt général,  mais de l’aléatoire : « La clé de ces contrats n’est pas l’engagement et le service public.»

Note 01Olivier Rouquan est politologue, enseignant-chercheur en sciences politiques et chercheur associé au CERSA  - Centre d'Etudes et de Recherches de Sciences Administratives et Politiques- . Il est l’auteur de « En finir avec le Président ! », Ed. Nouvelles François Bourin, Paris, 2017Retour au texte