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4 minutes pour ouvrir une brèche dans le statut de la fonction publique

Publié le lundi 18 juin 2018 , www.lagazettedescommunes.com

Dans la nuit de vendredi à samedi, vers 3h20, il n'aura fallu que 4 minutes au Gouvernement pour " faire sauter un verrou ". L'Assemblée nationale, à l'occasion de l'examen du projet de loi " pour la liberté de choisir son avenir professionnel " a adopté 3 amendements visant à ouvrir, sans conditions ni quotas, le recrutement de contractuels pour pourvoir les postes d'encadrement supérieur dans les trois versants de la fonction publique. Une mesure qui concerne 7 000 postes présentant un caractère de détachement fonctionnel dans la territoriale (350 postes pour l'hospitalière, 2 685 postes pour l'Etat). Tollé chez les défenseurs du statut, qui considèrent que sur la forme comme sur le fond, la ligne rouge est franchie.

visuel 4 minutes pour ouvrir une brèche dans le statut de la fonction publique

C’est Olivier Dussopt, secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Action et des comptes publics, qui a défendu simultanément les amendements nos 2162, 2160 et 2161. Déposés jeudi, après le passage du projet de loi en commission, ils prévoient, pour chaque versant de la fonction publique, le même dispositif. Celui-ci vise à ouvrir la possibilité de recruter par contrat à des postes de direction à caractère fonctionnel.  « L’enjeu est de diversifier la fonction publique et de permettre aux employeurs publics de recruter des profils nouveaux » a-t il expliqué.

Amendement n° 2160 - 7 juin 2018

Pour la rapporteure du projet de loi , la députée (Mouvement Démocrate et apparentés) du Val d’Oise  Nathalie Elimas, Il s’agit bien de « lever un verrou législatif » empêchant des personnes ne relevant pas du statut de la fonction publique d’exercer des fonctions d’encadrement dans l’administration. Elle n’y a vu que des avantages : cette  mesure devrait  permettre d’élargir le vivier de recrutement de la fonction publique, « en miroir à la possibilité ouverte aux fonctionnaires d’aller plus facilement travailler dans le secteur privé ». Autre avantage, cela faciliterait  l’accession des très nombreux contractuels de la fonction publique à des postes de direction.

Seule opposition nocturne, le député  (PCF) des bouches du Rhône  Pierre Dharréville, qui se dit «  très dubitatif » et  « surpris de la légèreté avec laquelle nous légiférons sur ces questions, dont j’estime qu’elles méritent une loi à part entière.»

« Procédure scélérate »

Les réactions sont d’autant plus fortes que la méthode  agace. Le dépôt d’un amendement gouvernemental en cours de discussion, deux jours avant la fin de la discussion du texte à l’Assemblée nationale, et sa discussion en pleine nuit, ce n’est pas du goût de tout le monde.

L’Association des DRH des grandes collectivités déplore l’irruption d’un cavalier législatif « alors même que les échanges avec les organisations syndicales et professionnelles ne sont pas encore achevés ».

Fabien Tastet,  président de l’association des administrateurs territoriaux (AATF) constate l’absence totale de concertation, « alors même que le Gouvernement ne cesse d’insister sur  sa volonté d’écouter. La réforme de la fonction publique est annoncée pour 2019, et le gouvernement dépose de façon scélérate des amendements sur un projet de loi qui n’a rien à voir ». L’AATF a saisi immédiatement par courrier  l’Association des maires de France des risques encourus :  » Une administration locale dont l’équipe de direction serait très largement composée d’agents contractuels exposerait la collectivité à une pression permanente au renchérissement des rémunérations, au creusement des écarts salariaux avec les autres agents de la collectivité »… mais aussi à « une perte de compétences ».

Courrier AATF à l'AMF 18 juin 2018

 Appel du 18 juin

C’est l’appel du 18 juin… pour  » une nécessaire mobilisation pour que ces amendements soient rejetés et soient intégrés au travail de concertation engagée par le gouvernement avec les associations d’élus et les syndicats ». Une demande également directement portée auprès du premier ministre Edouard Philippe.

Le vote solennel aura lieu ce mardi 19 juin après les questions au Gouvernement. Puis le projet de loi, examiné en procédure accélérée, passera au Sénat.